Au sud de l'Algérie, un désert de pierre et de sable, le Tassili N'Ajjer, que les trekkeurs du monde entier apprennent à découvrir
"Que viennent-ils chercher dans le désert? Il n'y a rien, absolument rien." Les mains dans le moteur de son
4 X4 qui vient de s'arrêter pour l'énième fois, Amoumen observe, au loin, un groupe de touristes. Ils avancent bras nus, le visage couvert d'une épaisse couche de crème solaire, arborent de larges lunettes noires et une étoffe ficelée à la diable, gourde à portée d'une main, appareil photo de l'autre. Ils ont un sac à dos qui couvre... tout le dos, et des chaussures de montagne qui s'enfoncent dans la dune.
Devant eux, un guide à la démarche souple qui porte beau. Son chèche ne laisse entrevoir que ses yeux soulignés de khôl. Il marche à pas légers, marquant de fines empreintes le sable. C'est un Targui (1). Un de ces hommes du désert qui furent longtemps les seuls à connaître les pistes et les puits salvateurs. Un nomade contraint par l'aridité croissante du climat de se sédentariser. Et qui, faute de mener les troupeaux de chèvres vers des pâturages anéantis par les sécheresses successives, s'efforce de perpétuer son mode de vie en guidant les randonneurs, nouveaux conquérants du désert.
Ici, au Tassili N'Ajjer, à l'extrême sud de l'Algérie, les trekkeurs viennent de plus en plus nombreux, d'Allemagne, d'Italie, d'Espagne, d'Autriche, de France. Manifestement l'actualité sanglante dans le nord du pays ne les effraie pas. "Cela se passe à 2 500 km d'ici", note un voyageur bordelais. Autant qu'un trajet Marseille-Istanbul. Noui, le guide targui, ajoute, en français. "Nous n'avons jamais eu ce genre de problème. Inch'Allah! Et puis, du nord au sud, il n'y a pas de route directe. La gare de chemin de fer la plus proche de Djanet, la capitale du Tassili N'Ajjer, se trouve à 1 500 km." Plus éloigné que Paris d'Alger.
Que viennent-ils donc chercher dans le désert? La réponse est unanime: "Le silence et la solitude", ce petit supplément d'âme perdu dans l'Occident urbain, matériel et confortable. Mais plus encore.
Découvrir le Tassili, grand comme trois fois la Belgique, le long des frontières du Niger et de la Libye, c'est remonter jusqu'aux premiers âges de la formation de la Terre. C'est aussi, peut-être surtout, "rencontrer" les premiers habitants du monde.
"Le parc recèle soixante-cinq millions d'années d'histoire de la géologie et deux millions cinq cent mille ans d'histoire de l'humanité", précise Hocine Ambès, directeur de l'Office du parc national du Tassili. Y vécurent des pasteurs, des paysans, et même des pêcheurs. Ils racontèrent leur vie quotidienne en traçant, en sculptant au poinçon, en colorant d'ocre des milliers de fresques, de peintures et de gravures rupestres dans le massif gréseux.
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